de Défi du Docteur Convertir en PDF

Faire le DFU, c’est (pour moi) s’attaquer à des distances et des dénivelés jamais atteints. Donc inquiétudes et interrogations, mais bon, motivé par la bonne cause, en prenant la journée tranquillement sans jamais se mettre dans le rouge, pourquoi pas. Restons modeste, je ne m’inscris que pour 4 cols pour une première, et puis si jamais je le sens bien, pourquoi ne pas passer à 5.

Objectifs : 1- le faire, 2- ne pas finir totalement cuit, 3-éviter de rouler la nuit (je me dis que si je fais 4 cols cela ne doit pas poser de problème, en revanche si je passe à 5, je calcule que je devrais arriver vers 21h30 si j’arrive à respecter mes prévisions horaires.

Les craintes avant le départ : 1- la pluie et l’orage, 2-ne pas y arriver, 3-la défaillance humaine ou mécanique, 4-les petits tracas (crampes, douleurs, selle, chute…)

Arrivée en fin de nuit à Barcelo, ne sachant pas à l’avance comment m’habiller, j’ai pris tous mes vêtements cyclistes, on improvisera. Plein de provisions dans la glacière…

Retrait des plaques de cadre, préparation, j’opte pour 3 couches pour la première partie car il ne fait pas très chaud. Je bourre les poches de gels, gâteaux (Figolu), de toute façon je pourrai refaire le plein au premier passage à Barcelo.

Regroupement pour le départ, je ressasse les objectifs et mes craintes (météo plutôt favorable mais risque d’orages l’après midi…Argh !).Nous sommes relativement nombreux. J’écoute attentivement les conseils de Claude Véran le métronome de l’organisation de ce défi. Je retiens cette phrase qui ne me quittera pas de la journée : n’abandonnez pas , même si c’est dur, pensez aux enfants atteints de mucoviscidose, ils comptent sur vous.

C’est parti, comme je l’avais prévu je reste dans le premier groupe jusqu’au pied du col de Pontis pour bénéficier de l’effet peloton et m’économiser. L’allure me convient sur cette portion plutôt descendante.

 

Col de Pontis, je le redoute pour l’avoir déjà grimpé, en raison de son fort pourcentage, bien que court. L’objectif est d’arriver là haut vers 7h sans s’être fait mal aux jambes. Tout à gauche, je monte tranquillement à mon rythme. J’arrive la haut sans m’être fait trop mal et surtout bien avant 7h. Pause pipi puis descente très prudente car route moyenne et conseils de prudence répétés par l’organisation.

Transition tranquille en petit groupe jusqu’au col St Jean. Celui la aussi je le connais bien, pas difficile. L’objectif est de monter sans se mettre dans le rouge et d’arriver avant 8h30. Je suis en compagnie de 4 autres fondus qui roulent un peu plus fort que moi, je dois donc m’accrocher et donc me mettre un peu dans le rouge (pas bon ça, mais je ne veux vraiment pas rester seul surtout après ce col pour le retour sur Barcelo et son faux plat montant). Je m’accroche au groupe jusqu’au sommet et là je constate avec plaisir qu’il est à peine 8h, je suis donc très en avance sur le programme.

La descente se fait à plusieurs avec un bon regroupement de fondus en bas de la descente. J’ai bien fait de m’habiller chaudement parce qu’il fait vraiment frais dans la descente. Nous croisons les Fondus qui débutent la montée, courage à eux. Nous faisons donc le trajet jusqu’à Barcelo en groupe ce qui permet de se ménager, même si je participe activement à la prise des relais.

Premier passage à Barcelo, retour à la voiture. Je retire la couche du dessus et change pour un coupe vent à mettre dans la poche pour les descentes à venir si besoin. Je mange, un peu de salé (chips…), je refais le plein pour attaquer les grands cols, que je ne connais d’ailleurs pas, bien que n’habitant pas bien loin. C’est reparti vers Uvernet Fours et son ravito. J’ai jusqu’à présent toujours roulé en groupe, maintenant c’est seul que j’aborde cette 2ème partie de la journée, ce n’est pas un problème puisqu’il ne s’agit plus que d’ascensions. Ravito bien sympa, bénévoles vraiment toujours aussi agréables depuis le début, ambiance hyperfamiliale, tout en étant pro, rien ne manque. Pour le moment je refuse le sandwich saucisson que l’on me propose, craignant que cela me « plombe » un peu dans la montée, j’en prendrai au retour. C’est parti pour le col d’Allos, il fait beau et bon, pas de nuage en vue, espérons que cela dure. Je monte tranquillement en surveillant bien le cardio pour que la fréquence cardiaque ne monte pas trop, je sais que cela va être long. Les jambes tournent bien, je ne sens aucune difficulté particulière, je suis euphorique. Paysages superbes. A mi chemin du col je croise les premiers qui descendent (je suis admiratif). Dans l’euphorie du moment, je décide, ça sera 5 cols, même si je sais que l’euphorie ne va pas durer et que ça risque de devenir plus dur ensuite. Parmi les pensées qui vont et qui viennent, le plaisir de contempler ce superbe paysage, s’immisce tel un message subliminal, le souvenir de ce sandwich au saucisson que j’ai refusé au ravito. L’image devient plus insistante : j’ai envie d’un sandwich au saucisson !

 

Arrivée au sommet, la encore bien plus tôt que l’heure que j’avais prévue (midi), il n’est que 11h15 !

Descente rapide mais prudente car la route est étroite, des motos montent et descendent, et surtout des voitures et notamment un camping car qui roule complètement à gauche. Saluts aux valeureux Fondus qui commencent la montée.

Retour au ravito d’Uvernet. Là j’ai deux priorités, d’une part annoncer au contrôleur que je souhaite poursuivre sur 5 cols , d’autre part : le sandwich au saucisson ! (ouf il en reste…). Accessoirement refaire le plein d’eau.

Après cette pause bien mérité (merci encore aux bénévoles pour leur gentillesse), ça repart à un rythme modéré pour la Cayolle. Je ne connais pas le col, j’ai vu sur les topos, que c’est long mais pas trop pentu. Au bout de 2 ou 3 km, malgré un site superbe j’ai l’impression d’avoir mangé mon pain blanc. Non pas que ça ne roule pas bien, mais apparaissent les premières crampes, heureusement facilement gérée pour la première par un pied à terre pendant 30 secondes , puis tout en pédalant ensuite. Dans le même temps apparaissent quelques nuages de mauvais augures sur les sommets. Et pour finir saut de chaine au passage du petit plateau. Bon, rien de catastrophique quand même, la température est idéale, la tête et les jambes suivent, juste un petit doute s’installe… . Finalement, le pourcentage n’étant pas trop terrible, la montée du col se poursuit bien, toujours superbe, je gère juste la boisson, l’alimentation et les braquets souples pour les crampes. Ma seule réelle inquiétude ce sont les nuages qui s’accrochent et noircissent. Arrivée au sommet finalement sans trop d’encombre, petite discussion sympathique avec les bénévoles et descente en gardant un œil sur ces bon sang de nuages. La descente est pénible car le revêtement est irrégulier, puis ça file direct barcelo avec un autre fondu qui m’a rejoint dans la descente, vent de face sur la fin (heureusement en faux plat descendant).

C’est l’heure de la pause repas au PC course de Barcelonnette. Objectif, souffler un peu, refaire le plein d’énergie (hydratation, alimentation), sans trop « couper » l’effort ni trop remplir l’estomac. C’est l’occasion de discuter un peu avec un autre fondu qui a l’expérience des années précédentes. Je ne m’attarde donc pas trop, ça repart pour le dernier col et pas le moindre : La Bonette. Celui la me fait plutôt peur par sa longueur, le dénivelé, l’altitude, la météo et ma fraicheur physique qui n’est plus optimale. Je me dis pour me rassurer que j’ai presque tout l’après midi pour le faire. Petit détour par la voiture pour refaire le plein et rajouter en plus du coupe vent, une protection contre la pluie dans la poche. Je repars vers Jausiers avec dans ma roue 2 autres fondus. Je craignais que la reprise après le repas soit difficile mais finalement ça roule bien sur cette portion quasiment plate. Petit stop au ravito de Jausiers pour saluer les bénévoles et boire un petit coca frais. Grosse inquiétude vu les nuages noirs. Je repars avec dans ma roue le fondu avec lequel j’avais déjeuné et qui me lâchera 2 ou 3 km plus tard.

 

 

Cette première partie d’ascension se passe bien, à l’économie. Puis le temps passant, la montée commence à me paraitre longue, le dénivelé devient plus difficile à appréhender, j’attends avec impatience de passer au Lac des Essaupres que j’avais repéré sur les différents topos relatant la montée de la Bonette. Je l’avais situé vers le milieu de l’ascension, mais il n’arrive pas… Pour la première fois j’ai vraiment du mal à avancer.

Je n’arrive absolument pas à savoir ou j’en suis de l’ascension. Je pose un pied à terre pour faire une petite pause, manger un morceau et boire.

Le temps est de plus en plus menaçant. Je jette un coup d’œil vers la vallée d’où je viens et je me rends compte qu’il pleut manifestement beaucoup en bas. Je repars au bout d’une minute ou 2, toujours dans le dur, toujours pas de lac en vue…, toujours le temps menaçant, aussi menaçant que les crampes qui font leur réapparition. Ca y est, il commence à pleuvoir, pas trop heureusement, je mets la protection contre la pluie, surtout qu’il commence à ne pas faire chaud. Ca donne l’occasion de refaire une petite halte. Reprise sous la pluie, je gamberge : pluie=route mouillée à la descente… Miracle, j’arrive enfin au lac, que je verrai donc sous la pluie, je reprends un peu de moral. Je commence à voir ou je vais : le col, la caserne de Restefond. Bien que ça reste dur j’arrive à avaler assez bien ce qui reste de la montée, maintenant que j’ai des repères visuels. Même la pluie se calme un peu. J’arrive donc au col, dans une ambiance fraiche, humide et ouatée par les nuages. Autant dire que le milieu est à la fois fascinant et hostile, donnant à la fois envie de rester à contempler ce paysage lunaire, mi terre noire, mi neige, et envie de redescendre dans des zones plus habitables. Je ne suis pas mécontent que l’ascension de la cime de la Bonette soit fermée pour cause de neige car je crois que j’aurai vraiment peiné à la faire.

 

 

Je fais valider la carte attestant de mon passage avec le sentiment du devoir accompli. Mots d’encouragement de la part des bénévoles emmitouflés dans leurs vêtements chauds (faut du courage pour reste là dans le froid).

Je mets toutes les couches de vêtements que j’avais préparées pour la descente (4 épaisseurs au total).

La descente est glaciale malgré toutes les couches de vêtement, seule l’idée d’avoir réussi à faire ce défi (au delà de ce que j’avais initialement programmé), me réchauffe un peu. Heureusement il ne pleut plus et la route n’est pas trop mouillée. Engourdissement des avant bras et des mains avec sensations de décharges électriques, c’est bien la première fois que cela m’arrive, mais c’est aussi bien la première fois que je fais un tel kilométrage et un tel dénivelé…

En perdant de l’altitude la température remonte et le temps devient plus clément. Après cette longue (et assez fatigante) descente, je fais une dernière petite halte pour souffler au ravito de Jausiers, le temps de reboire un coup et manger un morceau. Je croise alors encore des fondus qui débute seulement l’ascension de la Bonette, je ne peux qu’être impressionné par leur courage (surtout que j’apprendrais plus tard que certains d’entre eux auront fait au final les 7 cols…).

Alors que je pensais que je peinerai pour faire les derniers kilomètres pour rejoindre Barcelonnette, en fait ça roule tout seul, le coup de pédale est presque aussi souple qu’au départ et l’allure vive (certes aidé par le faux plat plutôt descendant). En roulant je fais le bilan et suis satisfait d’avoir atteint et largement dépassé les objectifs initialement fixés.

Retour au PC course vers 19h pour valider l’arrivée définitive. Retour sur la terre ferme, l’impression de venir d’une autre planète. J’ai l’impression que je n’aurai plus envie de remonter sur un vélo pendant pas mal de jour…

Retour à la voiture pour ranger le vélo, se changer tranquillement en attendant le début du repas prévu vers 20h.

Le repas est préparé avec toujours autant de gentillesse et d’efficacité par de souriant bénévoles. Echanges d’expériences à table avec les autres fondus, en se disant que ceux qui font les 7 cols ont bien du courage. Le repas requinque pas mal. Puis retour en voiture à la maison (j’ai la chance d’habiter à 80 km de la) en essayer de ne pas s’assoupir au volant.

La nuit se passe sans trop de douleur, le sommeil réparateur n’est troublé que vers 8h par un coup de téléphone d’un ami qui me propose une sortie vélo (en montagne) pour ce matin… Bon allez, ça peut pas se refuser, donc s’est reparti pour un coup…

Pour finir, merci et bravo à tous les organisateurs, vous êtes vraiment dignes de la cause que vous défendez, bravo à ceux qui ont affronté la nuit et la fatigue pour faire les 7 cols.

Conseil à ceux qui n’ont jamais fait le DFU, faites le ! Et à ceux qui l’ont déjà fait, refaites le ! Pour moi c’est décidé je reviendrai, pourquoi pas 7 cols même si cela me parait insurmontable.

Christian Boyer